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Plaidoyer pour un entraîneur camerounais (29.06.2007)
La Fecafoot en particulier et les Camerounais en général sont à la recherche d`un entraîneur pour les Lions Indomptables depuis le départ, l`année dernière, du Néerlandais Arie Haan. Ces derniers temps en effet, les choses semblent s`accélérer dans ce sens à la Fecafoot et au Minsep. Car, nous ne sommes plus qu`à quelques mois de la Can Ghana 2008 et les Lions viennent juste de confirmer leur qualification à ce grand rendez-vous du football africain.
Ainsi, il y a quelques semaines, la Fédération camerounaise de football a lancé un nouvel appel d`offres pour le recrutement d`un entraîneur devant encadrer la sélection nationale. Il apparaît que cet appel d`offres semble privilégier, une fois, les entraîneurs locaux. Certaines indiscrétions voient même Joseph Antoine Bell bien parti pour être sélectionné. Et du coup, de ce privilège accordé aux nationaux, est né un débat qui ne cesse d`alimenter les causeries des Camerounais. Ce débat s`articule autour de la problématique suivante : faut-il nommer un sélectionneur national comme cela a rarement été le cas ou un sélectionneur étranger comme cela est de coutume ? Pour beaucoup, un entraîneur étranger fait mieux l`affaire et pour d`autres, très peu notamment, c`est le contraire.
Débat
De notre point de vue, il ne s`agit là que d`un faux débat. Dans un pays normal, un tel débat ne se pose pas. L`équipe nationale relevant du patrimoine national, tous ceux qui participent de près ou de loin à sa gestion doivent être des nationaux. Et donc, il ne nous paraît pas judicieux que l`on ose même envisager l`hypothèse d`un expatrié à la tête d`un patrimoine national. Partant donc de ce principe, nous prendrons à contre-pied tous ceux qui pensent qu`il nous faut un sélectionneur étranger, quels que soient leurs arguments.
L`argument principal que l`on avance généralement pour justifier le recrutement d`un expatrié est celui de la compétence. On soutient en effet que les entraîneurs étrangers, notamment européens, sont plus compétents que ceux du terroir en raison des formations de qualité qu`ils reçoivent et de l`expérience professionnelle dont ils jouissent. Cet argument tient la route si on considère que le football est très développé en Europe ; mais en même temps, il soulève plusieurs interrogations qui nous poussent à le mettre de côté.
La première est la suivante : si l`on admet que les sélectionneurs étrangers sont plus qualifiés que les nationaux, est ce que cela signifie que le recrutement de l`un d`eux nous garantit systématiquement des victoires à tous nos matches ? Nous disons "non !", bien entendu. Car, depuis des décennies que nous avons des entraîneurs étrangers, les défaites que nous avons enregistrées ne sont pas négligeables. Nous nous sommes faits ridiculiser à plusieurs reprises à la Can. Parfois, nous avons été éliminés sans avoir traversé le premier tour, avec pourtant des expatriés au banc de touche. Toujours avec un expatrié comme entraîneur, nous avons manqué la participation à la coupe du monde 2006 en Allemagne.
La deuxième interrogation est celle-ci : le peu de fois que nous avons eu des nationaux comme sélectionneurs, n`avons-nous connu que des défaites ? "Non!", naturellement. Avec Jean Paul Akono comme entraîneur, les Lions Indomptables Espoirs ont remporté la finale des Jeux Olympiques de Sydney en 2000 ; et ceci après avoir triomphé des grandes équipes comme le Brésil, le Chili et l`Espagne. Nous voilà même qualifiés pour la Can 2008 au Ghana avec Jules Nyongha qui n`assure que l`intérim. Alors, si les encadreurs locaux sont médiocres comme le pensent certains, comment expliquent-ils ces brillantes victoires ?
En fait, si beaucoup préfèrent un entraîneur étranger en se basant sur le principe de la compétence, nous estimons quant à nous qu`il ne s`agit là que d`un prétexte. En réalité, nous souffrons d`un complexe d`infériorité enfouit dans notre inconscient collectif, qui nous pousse à toujours croire que tout ce qui vient d`ailleurs est bien ; surtout ce qui vient de l`Occident, de chez les Blancs. On croit difficilement qu`un Noir puisse faire mieux qu`un Blanc parce que nous nous considérons
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toujourscomme des incapables ; ce qui est bien malheureux. Hormis ce complexe d`infériorité, il y a aussi la jalousie et le tribalisme qui font que nous n`aimons pas voir l`ascension de notre frère. Nous préférons offrir un poste à un étranger que de l`offrir à un frère camerounais pourtant compétent, simplement parce que nous ne souhaitons pas le voir à un poste que nous ne pouvons occuper.
L`hypothèse d`un sélectionneur expatrié doit donc être évacuée. Il nous faut un entraîneur camerounais. Ceci est d`autant plus important qu`il est avantageux. Avec un entraîneur local, la cohésion entraîneur-joueurs est plus facile puisque la communication est aisée. Aussi, le traitement mensuel est moins coûteux. De plus, un entraîneur national connaît mieux qu`un étranger nos réalités et nos problèmes. En fin, une victoire remportée avec un Camerounais est une victoire fondamentalement camerounaise, sans la participation d`un étranger !…
Mentalités
C`est donc au vu de tout ceci, que nous pensons qu`il est grand temps que les Lions Indomptables soient encadrés par un Camerounais. Ce n`est pas la compétence qui manque. Si l`on cherche bien, on peut trouver de très bons entraîneurs en mesure de bien manager notre équipe nationale.
Mais, même avec l`avènement d`un entraîneur camerounais compétent, il y aura encore beaucoup de problèmes à résoudre pour que ce dernier puisse mener à bien sa mission. Il s’agit des problèmes liés à nos mentalités bizarres. Nous devons cesser de toujours chercher un bouc émissaire sur qui lancer la pierre dès que nous subissons des défaites. On se souvient encore de la manière par laquelle Jean Paul Akono a quitté l`encadrement des Lions Indomptables ; après de multiples humiliations, injures et même des promesses de mort venant des Camerounais. Juste parce que l`on estimait que c`etait lui la cause des mauvais résultats que l’équipe enregistrait. Pourtant, c`est lui qui venait de nous faire remporter la finale des Jeux Olympiques de Sydney en 2000 devant des grandes équipes de football et dans des conditions particulièrement difficiles.
Les Camerounais doivent aussi mettre fin à ce délire paranoïaque qui leur fait croire qu`ils doivent toujours gagner. Dans un match, on peut aussi perdre, même avec le plus grand entraîneur du monde ! Le plus important, c`est de tirer les vraies leçons de l`échec pour mieux faire dans l`avenir.
L`autre problème est celui de l`autonomie de l`entraîneur. Le gouvernement et les dirigeants du football doivent cesser d`imposer des joueurs aux entraîneurs. La sélection des joueurs doit incomber uniquement à l`entraîneur ; afin de lui permettre de mieux peaufiner ses tactiques de jeu en fonction des joueurs qu`il a sous la main. Par ailleurs, il y a aussi la question du respect de l`entraîneur par les joueurs. Tout joueur doit respecter son entraîneur, quelle que soit sa notoriété au plan international.
Sélectionneur national
Ceci dit, si tous ces problèmes sont évacués, nul doute qu`un sélectionneur camerounais peut très bien prendre en charge l`encadrement des Lions Indomptables. Car ce sont ces problèmes et bien d`autres qui ont toujours empêché aux sélectionneurs nationaux de s`affirmer.
Il est donc inadmissible et inacceptable que près de 50 ans après l`indépendance, nous continuons de croire que nous sommes des incapables et qu`il faut toujours faire appel aux experts étrangers. Rester dans cette logique revient aussi à dire que nous pouvons aller chercher un Européen pour venir diriger notre pays qui se porte autant mal que notre football. Mais si on demande aux Camerounais s`ils sont près à accepter qu`un Européen vienne être président de notre République, ils refuseront à l`unanimité parce que nous sommes un Etat indépendant et donc, que seul un camerounais doit nous diriger. Mais pourquoi ne pas raisonner de la même manière quand il s`agit de trouver un entraîneur pour notre équipe nationale ?
Avoir un entraîneur national camerounais est donc une question de dignité, de souveraineté et de maturité. Ce qui est national doit rester national.
Par Par Segnou Siéwé Tél : 75 59 48 84 Senou_2@yahoo.fr
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