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Détournements : Questionnements sur la gestion des fonds alloués aux J.O. 2004 (16.11.2005)
Depuis 2004, le ministère des Sports et de l’éducation physique est secoué par une sombre histoire financière.
L’histoire remonte aux Jeux Olympiques de 2004 à Athènes en Grèce. Jeux auxquels le Cameroun a pris part dans cinq disciplines : judo, haltérophilie, natation, athlétisme et boxe. Si les résultats sportifs sont connus, il convient de signaler qu’un grand flou existe quant à l’usage des fonds alloués pour les équipements et autres dépenses. Une enquête nous a permis de mettre à nu certaines malversations que l’on tenait à cacher. Un prestataire de services, Ets Douglas, domicilié à Yaoundé et dont le N° du contribuable est PO 75600007200C, a gagné le marché de livraison des équipements pour les athlètes camerounais devant prendre part à ce grand rendez-vous sportif et certainement pour l’ensemble de la délégation. Un marché est passé de gré à gré. Le fractionnement produit huit factures dont aucune n’atteint 5 millions de francs Cfa alors que la facture totale du matériel livré est de 32.097.850 Fcfa.
La première facture, celle qui concerne le judo, l’haltérophilie et la natation se chiffre à 4.204.000 Fcfa. Elle concerne les livraisons suivantes : Judo ; huit kimonos avec pour prix unitaire, 295.000 Fcfa, quatre ceintures à raison de 25.000 Fcfa l’une, quatre coupe-vent à 75.000 Fcfa la pièce, une pèse-personne à 210.000 Fcfa et deux chronomètres à 84 000 Fcfa l’un. En haltérophilie, quatre combinaisons au prix de 95.000 Fcfa chacune, deux paires de chaussures pour 180.000 Fcfa la paire, deux ceintures pour 80.000 Fcfa la pièce et quatre T-shirts à raison de 18.500 Fcfa l’un. Pour ce qui est de la natation, deux maillots de bain soit 20.000 Fcfa le maillot, deux lunettes pour 13.000 Fcfa la paire, deux bonnets pour 6.500 Fcfa pièce et une paire de sandale au lieu de deux, à 13.000 Fcfa.
La deuxième facture, celle qui concerne uniquement les cinquante survêtements (on doit s’étonner du fait que cette délégation soit aussi forte), s’élève à 4.150.000 Fcfa. Soit 83.000 Fcfa un. Quant à la troisième facture, elle s’élève à 4.050.000 F Cfa. Elle représente : cinquante sacs de sports à 44.500 Fcfa pièce, cinquante T-shirts pour 18.500 Fcfa un, quarante serviettes à raison de 6.500 Fcfa une et seize Sweat shorts pour 40.000 Fcfa un. La quatrième facture se chiffre à 4.095.000 Fcfa, représentant cinquante paires de tennis à 67.500 Fcfa la paire et seize collants pour 45.000 Fcfa pièce.Quant à la cinquième facture, elle se chiffre à 4.200.000 Fcfa. Elle comporte seize paires de pointes pour 120.000 Fcfa la paire, huit sacs à pointes à raison de 45.000 Fcfa le sac et seize ensembles pour compétition au prix unitaire de 120.000 Fcfa.
La boxe a, à elle toute seule, deux factures de 4.212.000 Fcfa et 4.032.500 Fcfa. Pour la première, elle comporte dix Boxing Gloves pour 145.000 Fcfa un, cinq shorts à raison de 60.000 Fcfa un, cinq polo shirts pour 55.000 Fcfa la pièce, dix débardeurs au prix unitaire de 80.000 Fcfa, cinq chaussures de boxe pour 140.000 Fcfa la paire et cinq protège-dents au prix unitaire de 7.400 Fcfa. En ce qui concerne la deuxième, il y a dix Head Guards pour 135.000 Fcfa un, dix Small Gloves au prix unitaire de 55.000 Fcfa, dix larges Gloves à raison de 55.000 Fcfa un, trois Bag Mult pour 130.000 Fcfa la pièce, cinq Safe Guards au prix unitaire de 60.000 Fcfa, vingt-cinq bandages au prix unitaire de 9.500 Fcfa, un Punching Bag à 235 000 Fcfa et quarante paire de bas ( pourquoi faire ?), à raison de 10 500 Fcfa la paire. La huitième facture porte sur le flockage des équipements. Il n y a ni la quantité ni le prix unitaire. Le montant total de celle ci est de 3.200.000 Fcfa.
Des interrogations
Deux constats sont faits : pourquoi ce marché a été tant émietté avec des factures avoisinant
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toujours les cinq millions, s’il n’y avait une intention manifeste de soutenir un opérateur économique ? Pourquoi, comme nous l’avons appris pendant notre enquête, cet établissement n’a pas reversé les 18,7% de la Tva et les 1,1% de l’IR. Au cours de l’enquête, le reporter du Messager a rencontré le directeur des sports, Ndjana Robert, pour en savoir plus. Celui a sollicité à ses côtés, pendant l’entretien, la présence de quelques uns de ses collègues : Noungui Pierre (Dag), Mme Andéla Margueritte (intendant au moment des faits), Emanye Jean (chef de la cellule de communication au moment des faits et depuis le 18 octobre 2005 conseiller technique N° 2 au ministère de la jeunesse) et Naoussi André (actuel chef de la cellule de communication). En leur présence, le directeur des sports a dit être étranger à cette affaire qui “ concerne une entreprise qui a gagné son marché dans de très bonnes conditions. Je ne sais pas en quoi je suis impliqué afin que vous veniez à la recherche des informations à mon niveau ”, a t il lancé, apparemment déçu par cette présence certainement insolite pour lui, pour une affaire qui ne regarderait pas la presse, avant de se retourner vers M Noungui Pierre et Mme Andéla Margueritte pour dire : “ j’espère que c’est un dossier clos. Une commission d’enquête est passée par ici pour cette affaire. Je n’ai plus rien à dire là-dessus. Je voulais tout simplement que vous soyiez témoins du fait que les gens cherchent à me nuire. Vous n’avez rien à dire ? ”.
En se séparant du reporter, le directeur des sports a tenu à préciser : “ je tiens à dire que je suis directeur des sports. Quelqu’un d’autre à ma place ne vous recevrait pas comme moi. Je suis trop simple c’est pourquoi tout le monde pense qu’on peut m’aborder n’importe comment. En plus, je sais qu’il y a des problèmes dans certains esprits qui attendent les nominations. Il y a une grande structure de l’Etat qui est venue m’entendre sur ce problème. Ce n’est pas gratuit si vous venez aussi. Mais retenez que je suis un dur à cuire ”. A t il balancé avant d’aller avec les siens à “ une importante réunion de service ”. La réaction du directeur des sports est compréhensible, bien qu’il n’ait pas été impliqué par le reporter pour une quelconque magouille. Puisqu’il n’a pas trouvé une réelle justification du compte d’emploi qu’il a dressé au sujet des dix-neuf chambres qu’auraient occupés les athlètes camerounais et leurs encadreurs. Sur ce document qui porte sa signature, il dit avoir dépensé 74.690,40 Euros sur les 92.135 Euros qu’il a perçus.
Pourtant, sauf changement de réglementation uniquement pour les athlètes camerounais, les sportifs sont logés par le Comité international olympique (Cio). C’est donc surprenant que l’on dise avoir dépensé une telle somme pour l’hébergement. Et si tel était le cas, où sont partis les 17.444,40 Euros de différentiel ? On annonce avoir connu des problèmes qui nécessitaient leur usage. Voilà ce qui ressort de nos investigations sans grande conviction. Du moins le ministre de la Jeunesse et des sports de l’époque peut en dire encore davantage sur cette affaire. Surtout qu’au cours de notre enquête, et en présence du directeur des sports, un cadre du Minsep a dit que “ l’argent était aussi géré par le particulier du ministre ”. C’est dire le degré d’implication des uns et des autres. Il n y a donc pas que cette affaire. D’autres sommes ont été perçues par des gens qui n’avaient pas qualité. Tout comme certains montants n’ont pas été reversés dans les caisses du trésor public. Tous ces produits livrés ont été surfacturés. Sur le marché national, aucun kimono ne coûte plus de 100.000 Fcfa. Comment justifier qu’on puisse en vendre un à 295.000 Fcfa ? Des curiosités, c’est sur toute la livraison.
Par Sandeau Nlomtiti
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