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LE SPORT AU PERIL DE L’ETHIQUE (31.07.2006)
Le 23 mai dernier, la police espagnole a procédé à l’arrestation de Eufemiano Fuentes chez qui elle a saisi du matériel et des produits dopants, ainsi que des poches de sang et de plasma congelés et des listes de noms codés détaillant les “ clients ” du médecin. C’était lors de la “ Vuelta ” (tour cycliste d’Espagne) 2006. Suite à cette affaire de dopage sanguin, douze coureurs dont les favoris, l’Allemand Jan Ullrich et l’Italien Ivan Basso, ont été exclus du 93e Tour de France.
Cinq jours seulement après que le monde entier a célébré pendant un mois la plus grande fête sportive mondiale du sport le plus universel, le football, au Mondial allemand, les “ Tifosi ” Italiens ont brutalement arrêté l’allégresse de la victoire de la “ Squadra Azurra ” à la 18e coupe du monde du fait du verdict de l’opération “ pieds propres ” instituée dans l’affaire des matches truqués et autres échanges de faveurs dans le “ Calcio ”.
Jeudi dernier, l’équipe Phonak a indiqué dans un communiqué que le coureur américain Floyd Landis, vainqueur du Tour de France 2006, avait fait l’objet d’un contrôle antidopage positif à la testostérone et qu’elle avait réclamé une contre-expertise comme le prévoit le règlement de l’Uci.
Deux jours plus tard, son compatriote Justin Gatlin, champion olympique du 100 m, co-recordman du monde du 100 m (9”77 avec le Jamaïcain Asafa Powell), déjà contrôlé positif en 2001 aux amphétamines alors qu’il était amateur, a annoncé samedi avoir été déclaré positif “ à la testostérone ou à l’un de ses précurseurs ” lors de la réunion des Kansas Relays, le 22 avril dernier.
En un trimestre, deux champions du monde dans leur spécialité, le cycliste Floyd Landis et le sprinteur Justin Gatlin, et des leaders et directeurs sportifs d’équipes cyclistes tombent pour dopage. Le Calcio, le plus prestigieux des championnats du sport le plus populaire, le football, expose ses grossières tricheries. Le sport de haut niveau s’illustre au péril de l’éthique.
Une analyse optimiste de cette multiplication de révélations est qu’elle prouve que la lutte contre le dopage ou la corruption portent leurs fruits. Bon nombre de tricheurs ainsi révélés sont des cyclistes. Sur le fond, la petite reine paye un tribut à un lourd passé et à ses efforts tardifs pour endiguer le fléau.
“ Le dopage concerne tous les sports ”, a reconnu, samedi, le président du Comité international olympique (Cio), le Belge Jacques Rogge, à Rome. “ Il y a des sports dont les cas de dopage ne font pas la ”une” des journaux. C’est parce qu’il y a une couverture médiatique (importante) que les gens pensent qu’il y a plus de problème ” dans le cyclisme, a-t-il ajouté.
L’ancien triple vainqueur du Tour de France
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cycliste (1986, 1989 et 1990), l’Américain Greg LeMond, voit dans le contrôle antidopage positif de Floyd Landis une révélation de la tragédie que traverse ce sport où “ même les gens bien sont obligés de tricher ”, conséquence regrettable du “ plus vite, plus loin, plus haut ” que préconisent les sponsors.
Dans le cas du Calcio, l’argent et les lobbies sont montrés du doigt. L’économiste italien Marco Vitale, spécialiste des finances du football, cité par Afp, estime, après le jugement en appel abaissant les sanctions des quatre clubs impliqués dans l’affaire des matches truqués, que “ le lobby du Calcio s’est montré très puissant et a débouché sur une décision déséquilibrée et instrumentalisée. C’est un coup porté à l’assainissement attendu du monde du Calcio. Une sentence forte aurait représenté un point de départ pour une réforme ”.
Le changement ne sera pas facile à opérer : “ Quand la justice est entrée en jeu, son intervention (...) a débouché sur des sanctions fortes, peut-être excessives. Mais cela n’a pas suffi, trop de gens refusent le changement ” a-t-il ajouté.
Certes, il y a les dégâts : “ Nous savons qu’un individu, cela peut être un entraîneur, un formateur ou un athlète, peut gâcher un sport entier en trichant ”, affirme Jim Scherr, directeur général du Comité olympique américain (Usoc). Mais, la crédibilité du cyclisme n’est pour autant pas entamée, car, “ un sport est crédible quand il effectue des contrôles nombreux durant les compétitions et de façon inopinée, quand il est prêt à punir les athlètes mais aussi l’entourage des athlètes. Le cyclisme fait tout cela ”, a déclaré le président du Cio.
La lutte doit s’intensifier dans la solidarité vu que “ personne n’est à l’abri des conséquences du contrôle antidopage. Il faut que la panoplie pour isoler les tricheurs se renforce. Elle est déjà là avec les contrôles en compétition, et hors compétition (...) On a les armes en main, et il faut maintenant qu’au niveau international tout le monde s’y mette vraiment ”, souhaite le ministre français des Sports, Jean-François Lamour.
Les armes doivent être bien ajustées pour éviter les dégâts collatéraux. D’autant qu’il vaut mieux libérer un coupable que de condamner un innocent.
Les organisateurs de la Grande boucle affirment leur détermination à lutter contre le dopage : “ On a envie de se battre. Nous avions dit que nous avions gagné une bataille, mais pas la guerre. Cela prouve que l’étau se resserre. Notre volonté est intacte. Il va falloir être fou pour continuer à tricher ”, a estimé son directeur. Et les fous se délectent de l’appât du gain et la quête démentielle de la célébrité, au mépris de la dimension ludique et éthique du sport.
Dominique TOUKAS
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