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Cameroun-Côte d’Ivoire : Devine qui vient jouer ce dimanche (02.07.2004)
Des Lions aux griffes de lionceaux accueillent la meilleure sélection africaine du moment.
Il y a 20 ans à Abidjan, le président Félix Houphouët Boigny remettait le trophée de la Coupe d’Afrique des nations à Théophile Abéga, le capitaine tout heureux d’une exceptionnelle sélection des Lions indomptables qui venait de déplumer les « Green Eagles » du Nigeria, et d’offrir au Cameroun impérial en clubs, le seul trophée africain qui manquait à son tableau de chasse. Alors, le président, se souvenant que pour en arriver là, les Lions indomptables avaient terrassé les Eléphants de Côte d’Ivoire en match de poule, avait eu ces mots: « Cette année, les Eléphants étaient encore des éléphanteaux. Bientôt, ils seront des éléphants, et l’Afrique se mettra à leurs pieds. »
Si « Le Vieux » devait revenir à la vie aujourd’hui, il verserait certainement une lagune de larmes sur sa Côte d’Ivoire, terre de paix et d’hospitalité, que ses héritiers n’ont pas fini de mitrailler et de couvrir du sang de ses fils sur lequel il sera bien difficile de passer l’éponge de l’oubli et du pardon. Mais, il aurait une bonne raison de se réjouir : ses éléphanteaux sont devenus des éléphants. Et quels Eléphants ! De gros pachydermes solides sur leurs quatre pattes : une attaque de feu, un milieu percutant, une défense intraitable et un banc de touche indiscutablement d’expérience et de qualité.
Après avoir pris un bain de confiance il y a deux semaines dans les eaux du Nil où personne avant eux n’avait terrassé les Pharaons d’Egypte depuis 53 ans, en éliminatoires de la Coupe du monde, voici donc ces Eléphants en forêt équatoriale, barrissant face à des Lions aux griffes de lionceaux, qui ne sont plus sûrs de demeurer indomptables et rois en cette forêt qui est leur.
Les Lions sur papier
Oui, la Côte d’Ivoire fait peur aux Lions. Il n’y a qu’à entendre les pleurs du sélectionneur Winfried Schäefer, en quête désespérée d’un buteur, d’un défenseur central, d’un meneur de jeu…à la recherche d’une équipe, tout simplement. Et pourtant, au regard du passé des deux sélections, le Cameroun ne devrait pas redouter une confrontation avec la Côte d’Ivoire, surtout pas dans son antre du Stade Ahmadou Ahidjo où il ne s’est plus incliné depuis cette finale de la Coupe de l’Udeac perdue face au Gabon en 1987 (0-1). Le Cameroun dont Didier Drogba disait en janvier dernier qu’il est « la meilleure équipe du continent africain, et l’une des meilleures au monde », c’est tout de même 5 participations à la Coupe du monde, dont 4 d’affilée et une place de quart - de - finaliste en 1990 ; un titre olympique et 4 Coupes d’Afrique des nations.
En face, la Côte d’Ivoire qui a enfin réussi à décrocher une Coupe d’Afrique des nations au Sénégal en 1992, n’a jamais connu la joie d’une phase finale de Coupe du monde. Elle aurait bien pu aller aux Etats – Unis en 1994, si , à la suite d’une défaite 1-4 lors de la dernière journée, elle n’avait dû abandonner la première place de son groupe au Nigeria, à la différence de buts. Elle doit par conséquent se contenter aujourd’hui d’un maigre bilan de 43 matches en éliminatoires de la Coupe du monde, pour 20 victoires, 15 nuls, 8 défaites, 70 buts marqués et 43 encaissés.
Mieux, les Eléphants n’ont presque jamais fait le poids face au Cameroun en compétition officielle. Les deux sélections se sont rencontrées à 6 reprises en phases finales de la Coupe d’Afrique des nations. N’est – ce pas face à la Côte d’Ivoire que le Cameroun avait livré et gagné
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son premier match (3 – 2) de Coupe d’Afrique des nations à Khartoum en 1970 ? C’est également en Côte d’Ivoire que le Cameroun a remporté sa première CAN, non sans avoir au passage éliminé le pays organisateur (2 – 0). Les chemins des deux sélections devaient à nouveau se croiser lors des demi-finales de la CAN 86 en Egypte et un but de Roger Milla allait suffire à confirmer la suprématie camerounaise (1 – 0). 14 ans plus tard, au Ghana, des Lions conquérants, condamnaient Ibrahima Bakayoko et les siens à subir les foudres du Général Robert Gueï (3-0) et devaient confirmer cette supériorité en 2002 au Mali (1 – 0). Seule exception dans cette longue série camerounaise, la demi-finale de la Can 1992 qui avait vu des Eléphants robustes, triompher aux tirs aux buts d’une sélection des Lions indomptables qui ne s’était pas encore remise de son bel été italien.
De vrais éléments
Pour la rencontre de dimanche, les Lions indomptables partiraient donc favoris sur le papier. Seulement voilà : la Côte d’Ivoire n’est pas un Eléphant en papier. Elle l’est sur le terrain. Et, les Lions indomptables ont déjà payé pour le savoir ; eux qui ont été laminés (0-3) par cette sélection ivoirienne en match amical à Châteauroux , en France le 11 février 2003. Depuis, la Côte d’Ivoire n’a pas cessé de s’affirmer comme la meilleure sélection africaine du moment. Si elle sait gagner chez elle à Abidjan, elle est aussi et surtout capable d’aller s’imposer partout ailleurs sur le continent. N’est-elle pas allée disposer des Tunisiens (2 – 0) chez eux à Tunis, juste un mois après leur victoire à la dernière CAN? Son succès en Egypte (2- 1) il y a deux semaines, achève de lui donner le statut de grand d’Afrique.
Ce succès, la Côte d’Ivoire le doit à une génération de joueurs exceptionnellement brillants, à l’image de Didier Drogba, (meilleur joueur du championnat de France), Aruna Dindane (meilleur joueur du championnat de Belgique), Kolo Touré (le roc d’Arsenal), l’increvable Cyrille Domoraud, le maestro Didier Zokora, l’ingénieux Yapi Yapo, ou les virevoltants auxerrois Kalou et Akalé, et on en oublie d’autres comme Kader Keita , Zézéto, Antonin Koutouan, François Zoko , Jean – Jacques Gosso etc, que la sélection n’utilise pas pour le moment. Mais comme aimait à le dire le Français Robert Nouzaret, ex-sélectionneur ivoirien, « entre les Juniors, les Olympiques et les Séniors, nous avons une quarantaine de très bons joueurs sous la main pour les éliminatoires de la Coupe du monde 2006 ».
C’est vrai, la Côte d’Ivoire a toujours enfanté des joueurs talentueux, tels que Laurent Pokou, meilleur buteur indétrônable de l’histoire de la CAN, ou l’excellent dribbleur Youssouf Salifou Fofana, le percutant Abdoulaye Traoré, voire des joueurs de devoir comme Pascal Miezan, Gadji Celi, Michel Goba ou Kassi Kouadio Lucien. Mais, la génération actuelle a quelque chose de spécial. La Côte d’Ivoire de Didier Drogba a une ambition. Elle est programmée pour aller à la Coupe du monde 2006. Ces garçons qui jouent ensemble depuis le bas âge pour avoir été presque tous formés à l’Académie de Jean – Marc Guillou à Abidjan - dont la Côte d’Ivoire cueille aujourd’hui les fruits -, ont grandi avec le rêve de ce Mondial allemand. Et, ils peuvent le réaliser. A condition que l’expérience du sélectionneur Henri Michel sache leur éviter les travers de la facilité et de la grandiloquence dans lesquels les Gaiendés du Sénégal, pourtant brillants, sont trop vite tombés.
Par Ambroisse EBONDA
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