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Iya Mohamed : Le grand muet du palais de vitres fumées (04.07.2010)
Depuis la déculottée des Lions indomptables en Afrique du Sud, le président de la Fecafoot s’est muré dans un assourdissant silence.
Iya Mohamed n’est pas Jean-Pierre Escalettes. Le président de la Fédération française de football (Fff) a rendu son tablier six jours après l’élimination de l’équipe de France au premier tour de la 19e édition de la Coupe du monde. «J`assume avec lucidité ma part de responsabilité. Ma décision est essentiellement dictée par la volonté de préserver et de faciliter l`évolution d`une institution que je sers avec passion depuis des décennies», dira celui dont le mandat de 7 ans à la tête de l’instance faîtière du football français devait s’achever en 2012. Critiqué pour son soutien sans faille au sélectionneur Raymond Domenech, Escalettes a été entendu par la commission des Affaires culturelles et de l`Education de l`Assemblée nationale lors d`une audition ouverte à la presse trois jours après sa démission.
Muet comme une carpe depuis la campagne désastreuse des Lions indomptables en Afrique du Sud, d’aucuns mettraient leurs têtes à couper pour soutenir qu’Iya Mohamed ne démissionnera pas de ses fonctions de président de la Fécafoot. De même, l’on peut parier qu’il ne sera pas entendu à l’Assemblée nationale comme cela a été le cas pour son homologue français. Seul le ministre des Sports et de l’Education physique, Michel Zoah, sera soumis au feu roulant des questions des députés. Pourtant, nul ne saurait absoudre la Fécafoot, au même titre que le Minsep, l’entraîneur ou les joueurs, dans l’échec cuisant du Cameroun au pays de Nelson Mandela. Autant qu’on s’en souvienne, c’est Iya Mohamed, le président de cette fédé qui s’était rendu en France pour parachever les négociations avec Paul Le Guen dans la perspective de la signature du contrat du technicien breton avec le Cameroun.
Au lendemain de la contre-performance des Lions devant les Samouraïs japonais (0-1) à Bloemfontein, au mépris de la volée de bois vert contre Paul Le Guen et ses poulains, Iya Mohamed dira sans ambages : «C`est mon devoir de protéger tout ce monde, même si moi aussi j`ai des avis personnels sur la question. Je suis tout de même l`artisan de la venue de Paul Le Guen et je me dois de le protéger du mieux que je peux». Une posture qui rappelle bien celle de Jean-Pierre Escalettes au plus fort des critiques d’une grande partie de l’opinion publique française contre Raymond Domenech.
Dans un élan optimiste, Iya Mohamed affirmera, après la défaite contre le Japon que «ce n’est pas la première fois que nous [Les Lions indomptables, ndlr] sommes dos au mur et nous avons très souvent su nous en sortir». Mais la suite des évènements viendra faire mentir ces propos pleins d’assurance. Une assurance que M. Iya n’a jamais perdue à la tête de la Fecafoot depuis son avènement en 1998. Cette année-là, Vincent Onana, le président en poste, est incarcéré à la prison centrale de Kondengui pour une affaire de faux billets à la veille du Mondial France 98. Iya Mohamed se voit alors confier provisoirement la gestion du football camerounais jusqu’à l’assemblée générale extraordinaire du 11 avril 2000 à l’issue de laquelle, il devient président de la Fédération
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camerounaise de football.
Contrat
Election après élection, Iya Mohamed réussira toujours à se faire réélire, malgré la fronde de certains membres de son entourage. Sa dernière victime en date est l’universitaire Prosper Nkou Mvondo qu’il a vaincu par un score à la soviétique. L’enseignant d’université n’avait recueilli que deux voix sur la cinquantaine de suffrages exprimés. Il dénoncera en vain le code électoral qui faisait la courte échelle à son bourreau. Avant lui, Joseph Antoine Bell, Emmanuel Mvé, Phillipe Mbarga Mboa et autres Charles Noumangué ont échoué devant celui qui assume aussi depuis 1984 les fonctions de directeur général de la Sodecoton, dont le siège se trouve à Garoua.
A cheval entre Tsinga (Yaoundé) et Nigériaré (Garoua), Iya Mohamed s’est appuyé au fil de ses mandats à la Fécafoot sur ses secrétaires généraux et une fois sur un directeur général. Des fusibles qui se grillent au gré des intérêts du président de la Fécafoot. Après son éviction du poste de Dg, dans un brûlot intitulé «Desperate Football house, six mois dans l’enfer de la Fécafoot», l’ancien Dg de cette instance, Jean Lambert Nang, dénoncera le système d’affairisme et de corruption qui gangrène la fédération camerounaise de football, sans être suivi par personne. Effacé, celui qui déclinait jadis mécaniquement son identité au nez de certains membres de la délégation camerounaise au Mondial 98, a gagné, 12 ans après, beaucoup d’assurance et peut rester extraordinairement de marbre, laissant passer l’une après l’autre, les nombreuses tempêtes.
Depuis qu’il trône à la Fécafoot, l’ex Dg de Selcam et chef d’agence de la Bicic (ancêtre de la Bicec) se distingue surtout par ses démêlés récurrents avec sa tutelle, le ministère des Sports. En dehors de Etamé Massoma et Michel Zoah, avec qui il a eu des relations apaisées, le président de la Fécafoot a «défié» Mbarga Mboa, Augustin Edjoa et dans une certaine mesure Bidoung Mpwatt. Du haut de ce que ses détracteurs qualifient d’ «arrogance» ou d’ «insubordination», le diplômé en Sciences économiques de Zaria University, au Nigéria se «réjouirait» secrètement du limogeage de ses adversaires du gouvernement. Dans son conflit permanent avec le Minsep (ex Minjes), on se rappelle surtout du coup de sang de Phillipe Mbarga Mboa en 2006 qui demanda à Iya Mohamed de démissionner avec toute son équipe de la Fécafoot.
Le Dg de la Sodecoton refusera de se plier pas à cette injonction. En 2008, le puissant patron de la Fécafoot refusera de parapher le contrat de l’allemand Otto Pfister, nommé à la tête de l’encadrement des Lions indomptables.
Foulbé originaire de Garoua et âgé aujourd’hui de 60 ans, Iya Mohamed surfe allègrement sur la vague de la non-immixtion des politiques dans les affaires du football instruite par la Fifa. Redoutant une sanction de l’International Board, comme ce fut le cas au lendemain de la Coupe du monde 2002, du fait de l’affaire des grenouillères arborées par les Lions indomptables, le gouvernement s’est manifestement résolu à marcher sur les œufs à chaque crise entre le Minsep et la Fécafoot. Une posture qui donne des idées dans la «maison de vitres fumées» de Tsinga.
Georges Alain Boyomo
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