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COTE D’IVOIRE / CAMEROUN : LES 4 VERITES DE BELL (01.09.2005)
L’ancien portier des Lions indomptables analyse les chances des Lions, dimanche, face à la Côte d’Ivoire, le système Arthur Jorge et celui de Henri Michel.
Cameroun contre Côte d’Ivoire de dimanche est un rendez-vous capital pour l’Afrique et le Cameroun, ce d’autant plus que les autorités ont dû faire appel aux anciens Lions, comme vous, pour soutenir la jeune génération. Quel commentaire vous inspirent le match et cette option ?
Je voudrais d’abord faire des remarques qui vont rectifier la perception que les uns et les autres ont de ce rendez-vous. En Afrique, l’actualité, ce n’est pas Côte d’Ivoire # Cameroun. Il y a ce match-là ; mais, il yen a plein d’autres. C’est une journée éliminatoire, comme il y en a déjà eu, je crois sept. Mais, nous nous sommes focalisés sur notre match, ce qui est normal. Mais, il ne faut pas qu’on arrive à oublier que les matches se jouent dans d’autres groupes… Et que ce match-là, ne sera pas notre dernier match. La morale sportive veut que nous regardions ce match comme celui qu’il faut gagner, pour aller en coupe du monde. Mais, c’est un match que nous pourrions ne pas gagner et aller quand même en coupe du monde. C’est vraie que ça deviendrait plus hypothétique. Supposez simplement que la Côte d’Ivoire et le Cameroun fassent match nul, mais que derrière cela, la Côte d’Ivoire perde au Soudan et que le Cameroun gagne l’Egypte en dernière journée. Je voudrais simplement dire que ce match-là, il faut le voir pour ce qu’il est, il ne faut pas le grossir, au point qu’il occulte tout le reste. Et vous avez parlé de ma désignation, je voudrais là aussi faire des précisions, j’ai tout simplement été invité par le ministre des Sports à être avec les Lions, à partager leur quotidien, leur tanière, pendant deux jours, en Côte d’Ivoire, dans l’espoir que tous ces préparatifs méticuleux vont contribuer, d’une manière ou d’une autre, à mettre les Lions dans les meilleures conditions.
Vous avez été pendant plusieurs années, alors que vous évoluiez à l’Africa Sport d’Abidjan, le meilleur gardien de Côte d’Ivoire, en réalisant, par exemple, l’exploit de ne pas encaisser plus de quatre buts au cours d’un championnat. L’explosion du football ivoirien, aujourd’hui, vous surprend –elle ?
Non ! Elle ne me surprend pas, parce qu’elle ne date pas d’aujourd’hui. Il faut dire que les Ivoiriens, il y a bien longtemps, contrairement à nous qui n’aimons ni la planification, ni la préparation, encore moins imaginer le futur, la Côte d’Ivoire, elle, ce qu’elle peut récolter, aujourd’hui, date de très longtemps ; de l’époque où je jouais encore, du temps où Jean Marc Guillou est parti en Côte d’Ivoire avec un plan de développement, bien meilleur à ce qui se pratiquait déjà à l’époque au Cameroun, avec des dirigeants de sociétés qui soutenaient, qui mettaient de l’argent. Ensuite, il y a eu le travail d’un club particulier, l’Assec, qui s’est lassée des approximations et qui en mis en place des structures professionnelles, et dans cette vision-là, a pris un professionnel et a accepté de mettre sur pied cette académie de l’Assec, qui était, au départ, uniquement pour l’Assec ; mais, qui va fatalement bénéficier à la Côte d’Ivoire. Cette organisation-là, a permis de préparer de jeunes champions qui n’allaient pas remporter le prochain championnat de Côte d’Ivoire, mais qui sont aujourd’hui… ces Kolo Touré, Dindane, Kalou, Yapi…Tous ces joueurs sont venus de cette académie, où on a pris le temps, avec des gens qui savaient enseigner aux garçons comment jouer au foot, de préparer des jeunes, pour l’avenir et non pour gagner un titre dans les mois qui suivaient. Une expérience qui a fait tâche d’huile, puisque tous les autres se sont rapprochés de la méthode Assec, pour essayer de se rattraper du retard. Et, après cette étape de formation, l’Assec a commencé à accumuler des titres et ses jeunes ont fini par être l’équipe espoir de la Côte d’Ivoire, parce qu’ils étaient les meilleurs et on a même fini par accepter que leurs entraîneurs viennent. La Fédération ivoirienne a donc fini par reconnaître et à promouvoir ce travail. Aujourd’hui, les résultats sont-là. La voie du succès on la connaît ; encore faut-il avoir le courage de l’emprunter. Vous savez, pendant de très longues années, j’ai dit que nous n’étions pas sur la bonne voie et on m’a rétorqué que je n’étais pas patriote. Vous savez, il est plus facile de construire derrière les victoires que d’être obligé de courir derrière son passé, parce que le jour où nos victoires ne seront que du passé, il va être dramatique d’essayer de construire quelque chose. Je souhaite qu’on gagne la Côte d’Ivoire, et là, on comprendra pour avoir joué avec le feu.
Que peuvent les anciens Lions auprès des Lions pour une victoire dimanche ?
Non, non non ! Je ne sais pas si le ministre a pensé que ma présence et celle des autres allaient décourager les Ivoiriens. Je pense simplement qu’on est dans une sorte de séance de rattrapage, où on essaye de donner aux Lions indomptables, précisément, toutes les forces qui sont les leurs. Mais, comme je le disais, tout à l’heure, on aurait dû commencer cela plus tôt. Seulement, il faut dire que ce n’est pas nouveau. Moi, j’ai été au Ghana en 1979, pour une finale de coupe d’Afrique des clubs avec le grand Mbappè Lépé, qui nous accompagnait, qui n’était pas de l’Union de Douala, mais, il était là. C’était très bien de l’avoir, de le voir plaisanter avec nous, de le voir se moquer de nous à la suite d’un entraînement. Mais, il ne faut pas se tromper, ça gagne pas seul un match. Ça contribue, simplement, à mettre les joueurs dans un bon état d’esprit, s’ils le veulent. Nous ne pouvons pas déclarer que la présence d’anciens champions d’Afrique de 1984 va suffire à décourager la Côte d’Ivoire. Je dois dire que la Côte d’Ivoire, aujourd’hui, est largement entourée d’anciens joueurs, Kaba Koné, Alain Gouaméné…
N’empêche qu’on gagne la Côte d’Ivoire à domicile, au même stade Félix Houphouet Boigny. N’est-ce pas là un élément psychologique décisif ?
Mais, justement dans cette espèce de guerre de nerfs, je crois que c’est bien, parce que c’est vrai, on l’a fait, on a même fait plus dur en termes d’ascendance psychologique, les Ivoiriens croyant dur comme fer qu’ils devaient nous battre après des débuts poussifs. Mais, tout en admettant que c’est un élément psychologique positif, le match ne se jouera pas uniquement sur des éléments d’environnement, il finira bien par se jouer sur le terrain. Parce que, n’oubliez pas que ce qui est demandé aux Lions, dimanche, est un authentique exploit. Généralement, quand une équipe va à l’extérieur, elle a le privilège d’avoir un résultat à défendre. Nous, on va cette fois à l’extérieur, on n’a pas le privilège d’avoir le résultat à défendre, on a l’obligation d’aller tout arracher à un adversaire. Mais, les Camerounais ont déjà réussi de telles choses, je me souviens qu’il y a très longtemps, ce n’était pas l’équipe nationale, c’était le Canon qui avait fait deux buts partout à Garoua avec Biima, avant d’aller réaliser le hold up au Zaïre. Pour la qualification de la coupe du monde aux Usa, on a été obligé d’aller gagner en Guinée, pour rester à hauteur du Zimbabwe. C’est donc possible ; mais, on a aussi l’obligation de bien regarder la difficulté en face.
Pour revenir aux Lions indomptables, au match en lui-même. L’affaire Lauren Etamè Mayer –Raymond Kalla et leur retour en sélection a alimenté l’actualité d’avant match. Leur retour à la veille d’une échéance aussi capitale, qui demande de la concentration était –elle importante de manière aussi subite après plus de trois années d’absence ?
En espérant que ce que je dis ne va pas forcément influer sur les Lions, on peut dire que, sur ce plan-là, nous avons encore commis des erreurs qui me rappellent celles que nous avons commises avant la Can, en Tunisie. C’est-à-dire qu’au moment où on doit précisément se préoccuper de ce qui va se passer, de se donner toutes les chances pour remporter le match, on commet des erreurs de management qui peuvent déstabiliser ou distraire les joueurs. Le football, c’est comme la vie ; ça se joue avec les présents, la vie se vit avec les vivants. Il est inutile de regretter, mille fois, les disparus, ils ne peuvent plus rien pour les vivants. Hélàs ! c’est pareil dans le foot. Vous pouvez avoir un grand joueur blessé, il ne vous sert plus à grand chose. Donc, ce n’est pas son moral qui compte, mais le moral de celui qui va le remplacer. Je pense que tout le tapage, qui a été fait sur ces joueurs, était déplacé ; dans la mesure où, on ne s’était pas d’abord assuré que l’entraîneur en avait réellement besoin, que, d’autre part, les joueurs étaient absolument d’accord pour revenir. Tout travail, qui aurait dû être préalable et qui aurait pu être fait avec discrétion, avant éventuellement d’annoncer leur retour. Or, on l’a annoncé, on a fait beaucoup de bruit pour finalement pas grand-chose. Je ne suis pas sûr que, vu de loin, Raymond Kalla soit forcément le joueur qui manquait aux Lions. Je ne suis pas certain que les déclarations des Camerounais puissent influencer l’entraîneur. Personnellement, autant je n’étais pas d’accord en 2002 qu’on accuse Kalla d’être trop vieux et d’être responsable de la déroute du Cameroun en coupe du monde, parce que ce n’était pas vrai ; autant je pense que trois années de plus, pèsent très certainement et suffisamment lourd sur les jambes de Raymond Kalla. Et, trois années d’absence chez les Lions ne sont pas forcément de nature, aujourd’hui, à son âge, de favoriser un retour étincelant qui l’amènerait à dominer les joueurs qu’il trouverait. Et, surtout, je crois que trois années d’absence de Raymond Kalla, auraient dû être trois années pendant lesquelles on a réellement donné sa chance à quelqu’un d’autre qui, en trois ans, ne s’est pas établi en équipe nationale, nous laisse l’impression que finalement rien n’est réellement fait pour préparer l’avenir. Ce serait très grave. On n’appelle pas Kalla depuis 2002 après lui avoir manqué de respect et que pendant ce temps on n’ait rien mis en place au point qu’on en soit à aller le rappeler comme un sauveur, c’est très inquiétant pour le management des Lions Indomptables.
Vous avez, à coup sûr, regardez le match France # Côte d’Ivoire. Quels sont les points forts de cette équipe ?
Je pense qu’elle a un fond de jeu bien construit et bien évident, on l’a vu. Ce que je redoute, de ce match face à la France, c’est qu’il ait distrait l’esprit des camerounais. Nous, on n’est pas la France, ce n’était qu’un match entre deux autres équipes et un match amical, et qui a semblé être pris en compte par les Camerounais qui ont même donné l’impression que son résultat influencerait le classement de notre groupe. Je crains donc que ce match-là ne nous ait pas rendu service ; parce qu’il a été malheureusement visionné par trop de gens. Et, ce qu’il y avait à tirer, comme leçons, malheureusement pour nous, les Ivoiriens aussi l’ont fait avant même d’être sortis du terrain. Je les ai écoutés à
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la radio, ils avaient tiré ce qu’il y avait comme enseignements que nous pouvions aussi titrer. C’est dommage qu’on ait fait, nous-mêmes autant de bruit sur ce match ; il aurait été mieux de faire profil bas, parce que les fautes ivoiriennes sur ce match là, sont de deux natures. Sur le plan offensif, qui leur auraient permis de revenir à la marque et peut être de gagner, ce sont des choses sur lesquelles personne ne peut parier, on ne peut pas tabler dessus, parce qu’ils ont construit des actions de jeu, qui leur ont permis de se procurer des occasions de but qu’ils ont manqué, par maladresse. Mais, personne ne peut jurer que ces maladresses se reproduisent, alors que la construction du jeu, elle, peut se reproduire, parce qu’elle n’était due qu’à eux-mêmes. En plus, ils n’ont pas eu des occasions de but nées des fautes grossières de l’adversaire, mais de leur talent étant reproductif, ils peuvent donc le reproduire. Il ne nous reste qu’à croiser les doigts que, s’ils reproduisent la même chose, qu’ils soient tout aussi maladroits. De l’autre côté, ils ont commis des fautes défensives qui sont des fautes d’inattention …et ils peuvent les corriger comme ils peuvent ne pas les corriger. Mais encore, faut-il qu’on reproduise les mêmes situations premièrement et deuxièmement ? Je crois qu’il nous faut partir avec l’idée que toutes situations de jeu peut être un atout pour nous, et j’espère que Arthur Jorge les aura prises en compte, et qu’il les aura sérieusement travaillé. Il y va de notre intérêt, même si l’on suppose que la Côte d’Ivoire les aura sérieusement travaillées. Mais, si on a fait les choses dans le fond, il est difficile pour la Côte d’Ivoire, même pour les avoir travaillées, ces lacunes, de partir du laxisme total pour la perfection.
La Côte d’Ivoire dispose, tout de même, de deux atouts offensifs non négligeables, Didier Drogba et Aruna Dindane, qui sont les deux meilleurs buteurs des éliminatoires zone Afrique avec respectivement sept et six buts. On ne peut pas dire que le Cameroun est très bien parti.
Je pense que, si j’étais dans le staff des Lions, je ne m’attarderais pas sur les chiffres des Ivoiriens, parce qu’effectivement, ils sont impressionnants. Il faut le reconnaître, ils ont deux attaquants qui ont marqué beaucoup de buts et qui sont présents pour ce match. En plus, ils ont d’autres joueurs capables de marquer, ils ont des créateurs de jeu. Je crois que dans ce genre de situation, on essaye de se recroqueviller sur soi-même, pour choisir la meilleure tactique et, surtout, avoir le sang froid de mettre en œuvre sa propre tactique et ne pas s’attarder sur l’équipe en face. Moi, je suis un adepte du système qui veut qu’on s’attarde d’abord sur ses propres forces. Pourquoi, parce que si on passe le temps à parler de l’adversaire, vous risquez vous-même de vous retrouver dans une faute pédagogique qui va consister à démontrer que vous avez affaire à un adversaire beaucoup plus fort. Dans le cas précis de ce match, on va s’attarder à dire attention Didier Drogba joue comme ci, il bouge comme cela, que c’est un bon buteur, puis on va passer à Aruna Dindane, en disant lui aussi, il n’est pas mal. Si vous allez dire, par la suite, attention à Kalou, parce que c’est lui le meneur de jeu du Psg, puis vous allez dire, il faut être dans la zone de Yapi Yapo, parce qu’il est un créateur, donc à la rigueur vous allez vous-même sans vous en apercevoir, être en train de décrire une équipe qui est beaucoup trop forte. Et donc, ce n’est pas la meilleure méthode sur le plan pédagogique de pouvoir galvaniser ses troupes. On sait, on peut penser qu’on a affaire à des joueurs professionnels au sein des Lions qui savent, à quel point les autres sont forts ; donc dans ces conditions, il faut plutôt leur parler de votre stratégie globale pour museler l’adversaire.. Vous valoriser votre stratégie et vous valoriser vos propres forces, de façon à amener les joueurs à se transcender et de croire qu’ils peuvent remplir la mission qui leur est assignée.
Arthur Jorge, depuis son premier match contre le Soudan, est un adepte du système défensif, puisque utilisant plus de sept joueurs à vocation défensive. Or à Abidjan, il faut plus attaquer, le Cameroun étant contraint de gagner. Pensez-vous qu’Arthur Jorge soit capable de changer, et bousculer les Ivoiriens ?
En fait, si j’étais Arthur Jorge, pour une fois, je vais m’aventurer à cela. Vraiment, avec le tempérament de Arthur Jorge, mais juste avec un zeste de moi Joseph Antoine Bell. Si je fusionne les deux, je vous dirais qu’en fait, si j’avais eu un conseil à lui donner, c’était d’avoir le sang froid de rester lui-même. Au départ du match de dimanche, nous n’avons pas la qualification. Mais seulement, quand on constate qu’avant l’arrivée de Arthur Jorge, on ne jouait pas bien, même le jour où on gagne la Côte d’Ivoire à Yaoundé. Puis, lors des matchs retour, elle a joué progressivement avec les plus faibles du groupe, et n’a pas non plus été étincelante dans le jeu, mais a obtenu des résultats. Moi, je serais un “ Arthur-Joseph Antoine Bell ” : je dirais que je vais focaliser sur le fait que nous sommes capables d’obtenir le résultat, et donc, amener les joueurs à être des machines à faire du résultat. Dans ces conditions, je ne peux pas, en un ou deux jours, transformer l’équipe. Donc, qu’est-ce qui se passe, l’équipe de Côte d’Ivoire est une équipe qui marque beaucoup de buts, donc c’est une équipe offensive. Cette équipe là, ce que je sais Arthur n’était pas là, mais la partie Joseph Antoine Bell, c’est que cette équipe a joué à Yaoundé contre nature. Henri Michel s’est permis de la faire défendre et elle a fini par prendre deux buts, sans en marquer un seul. Donc, ça veut dire qu’on perd quelque chose quand on dénature le jeu de son équipe. Et ce jour-là, elle n’a pas eu d’occasion de but du tout, alors qu’elle a fait, par exemple, zéro but partout, en Libye avec plusieurs occasions de buts. Donc, quand elle joue au moins, elle a la satisfaction d’avoir des occasions de buts. Arthur Jorge a donc intérêt à rester lui-même. Ayant, par ailleurs, conscience qu’on n’a pas une équipe avec un fond de jeu, de manière à élaborer le jeu, dans ces conditions, je pense qu’il faut avoir le sang froid de laisser l’initiative du jeu aux Ivoiriens. Les Ivoiriens ne sauront jamais jouer autrement dimanche que d’attaquer, devant, en plus, leur public auquel ils voudront faire plaisir. Et, nous dans un registre qui nous convient à merveille. Maintenant, qui gagnerait dans cette opposition, je ne sais pas. Mais au moins, nous serons dans ce qui nous convient, les Ivoiriens aussi. Et, il vaut mieux que nous, au lieu d’essayer de perturber les Ivoiriens mais, en nous mettant nous-mêmes dans une configuration qui ne nous convient pas. Je pense qu’un Eto’o, un Webo, un Duala, peut, dans cette situation, arriver à nous faire gagner le match, alors que les Ivoiriens ont déjà prouvé, par deux occasions au moins, au Cameroun, où ils n’ont pas inscrit de buts et en Libye, que ça peut leur arriver de ne pas inscrire de buts. Il faudra jouer avec nos moyens et baser la tactique sur les joueurs dont on dispose.
La Côte d’Ivoire, au pire des cas, a besoin d’un match nul. Si donc elle refuse d’ouvrir le jeu, que va-t-il se passer ?
La Côte d’Ivoire ne peut pas, parce qu’elle ne sait pas. Elle ne sait pas faire autrement. A Yaoundé, la Côte d’Ivoire avait refusé de jouer. A mon sens, Henri Michel s’était largement trompé. Ce qui fait que Aruna, Drogba et Kalou, ne servaient absolument à rien sur le terrain. Au match retour, je suis sûr que, quoi qu’il arrive, la Côte d’Ivoire attaquera. Ce faisant, je pense qu’elle donnera la possibilité aux Camerounais de pouvoir la contrer, de pouvoir se servir du ballon. Maintenant, le problème est de savoir si le jeu camerounais pourrait contrer celui de la Côte d’Ivoire ; à savoir si, défensivement, on se serait mis en ordre de bataille pour contrer les Ivoiriens. Pour battre la Côte d’Ivoire, il serait maladroit de la priver de son arme offensive, au contraire comme nous savons qu’elle est moins bien sur le plan défensif, il suffira donc, de temps en temps, de la mettre mal à l’aise, défensivement, pour qu’elle recule un peu en mesurant le danger qu’il y a à aller de l’avant. Le problème, c’est que, si Henri Michel veut jouer à la défensive, il devra se priver de Drogba, Kalou, Dindane ou de l’un des trois. Sinon, il viendra attaquer et c’est seulement là qu’on pourrait la prendre à contre pied. Mais, Henri Michel est un Nantais qui a appris que la meilleure manière de défendre, c’est d’avoir le ballon. Cette fois, il ne l’oubliera pas, il va essayer d’avoir le ballon, question de ne plus répéter les erreurs de Yaoundé. Si j’avais été dans le staff des Lions, j’aurais choisi de laisser le ballon, 60 ou 65 % du temps aux Ivoiriens, parce que, pour marquer des buts, on n’est pas obligé d’avoir le ballon tout le temps, et je me serais positionné, de manière à les faire sortir suffisamment, en sachant que pour moi, Samuel Eto’o n’est jamais aussi dangereux que quand il part de loin.
Et maintenant, les Lions sont-ils capables de bousculer la Côte d’Ivoire ?
Les Camerounais auraient dû, depuis un certain temps, déjà s’en souvenir. Par le passé, nous avons été forts du fait de pouvoir reposer sur une défense solide qui ne prend pas de buts. Malheureusement, ça s’est un peu effrité. Je dois dire que je n’ai pas regardé avec un œil intéressé sur ce plan là pour dire pourquoi nous nous sommes mis beaucoup de buts. Mais, les Lions sont forts quand ils ne prennent pas de buts et donc je crois qu’il va falloir réveiller ce réflexe là. Ensuite, il nous suffirait d’un petit but, il ne faudrait absolument pas que nous nous compliquons la tâche, en prenant le but, qui ferait qu’il nous en faudrait beaucoup pour arriver à passer. Sans pouvoir établir que c’est une force actuelle de l’équipe du Cameroun, mais il nous faut faire appel à la solidité défensive. Ensuite, quelles sont les forces de l’équipe du Cameroun ? je crois qu’elle a le poids de l’histoire. On ne vit pas forcément le présent grâce au passé, mais on doit s’inspirer du passé pour vivre le présent. Et, je pense que l’équipe du Cameroun a un passé qui doit lui permettre de gérer cette affaire mieux que la Côte d’Ivoire. C’est un petit avantage. Ensuite, l’équipe du Cameroun doit compter sur sa psychologie, parce qu’elle a gagné le match aller ; parce que, dans le passé, elle avait gagné à Abidjan, et essayer d’oublier un match amical raté en France, qui n’était qu’un match amical. Le Cameroun, enfin, peut s’appuyer sur une arme sécrète, Achille Webo, qu’on ne connaît pas beaucoup, mais qui a marqué deux ou trois buts depuis le début de la phase retour. Ce qui est une très bonne performance, et qui doit faire que, secrètement, nous, puisque c’est un garçon, qui ne fait pas du bruit et autour duquel on ne fait pas du bruit, qui doit permettre que finalement Samuel Eto’o puisse constituer un leurre pour nos adversaires et que ce soit Achille qui les poignarde.
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