|
|
Football: Galères des entraîneurs (17.06.2005)
Bertille M. Bikoun
La plupart des coaches des clubs de D1 vivent dans une précarité permanente.
A la veille de la fin de la phase aller du 46ème championnat du Cameroun, le 16 juin prochain, à côté des traditionnels bilans sportifs, techniques et autres, l`on omettra certainement de regarder du côté des bancs de touche. Pourtant, que de mouvements de ce côté au terme des quatorze premières journées ! Le dernier en date est le limogeage de Joseph Kameni, entraîneur de Unisport de Bafang, remplacé il y a quelques jours par Jean-Marie Ngalamo, qui est revenu à ses anciennes amours. Un sort identique à celui de Gérard Mbimi, éjecté du banc de touche de l`Union de Douala et remplacé par l`ancien Lion indomptable Roger Feutmba. Avant lui, Lucien Nanga a fait les frais des mauvais résultats du Tonnerre Kalara Club (Tkc). Pour lui succéder, les dirigeants du club de Mvog-Ada ont fait appel au duo Bertin Ebwellé/Hans Agbo. Alexandre Bélinga avait été emporté par les remous qui secouent Racing de Bafoussam depuis son élimination de la Ligue des champions de la Confédération Africaine de football (Caf).
En général, les encadreurs techniques ont été licenciés pour "mauvais résultats". Très souvent, sans dommages, ni intérêts. Ces ruptures brutales temoignent de la situation précaire des entraîneurs de football au sein des clubs du championnat camerounais de première division. Pour la plupart, leur présence au sein de l`encadrement technique d`une équipe n`est pas toujours matérialisée par un acte écrit. Il s`agit très souvent de contrats moraux, de gré à gré. "Cela ne me dérange pas de ne pas avoir de contrat avec Canon de Yaoundé, dans la mesure où, s`il m`arrive de partir, je le fais sans autre forme de procès", afirme l`entraîneur principal du club, Dieudonné Nké. "Après la séparation, je ne voudrais pas être en train de courir derrière les tribunaux pour rupture abusive de contrat", explique-t-il.
Contrat
Il reconnaît cependant, comme beaucoup d`autres entraîneurs, que : "c`est toujours bien d`avoir un contrat avec son club employeur", beaucoup par contre, ne partagent pas son avis quant aux licenciements abusifs que l`entraîneur du Canon trouve "normaux". Et, poursuit-il: "quand tu est lié par un contrat, ta marge de manoeuvre est bien déterminée. Il y a des choses que tu ne regardes pas parce que cela ne te concerne pas, même si elles peuvent avoir une influence sur ton travail. Tout comme il y a des choses que tu es contraint de faire, de peur de ne pas atteindre les objectifs que les dirigeants du club contractant t`auront fixé. Ce qui n`est pas le cas lorsque tu n`as pas de contrat. Tu viens travailler en étant préparé, sachant qu`à tout moment, on peut te demander de partir".
De nombreux entraîneurs redoutent en effet les ruptures brutales de contrat qui ne sont pas propices, selon certains d’entre eux, à la sérénité. "Ils perturbent les résultats parce que vous travaillez dans la précipitation. Vous ne pouvez pas faire un programme de travail à long terme car vous n’êtes pas sûr de l’atteindre", affirme un entraîneur qui a requis l’anonymat. C’est pourquoi, de plus en plus, les entraîneurs exigent, comme Etienne Sonckeng de Bamboutos de Mbouda, un contrat. "Et celui-ci doit être notarié. A défaut, il doit être homologué par une autorité publique de la ville" du siège du club contractant. Etienne Sonckeng, par ailleurs ancien entraîneur de Sable de Batié, explique, en effet, qu’il doit son arrivée chez les Mangwa Boys au préfet de Mbouda, qui l’a présenté aux membres du comité provisoire de gestion.
Ces derniers, dans le contrat qui les lie pour la présente saison à Etienne Sockeng, lui ont fixé comme objectif général "d’aller le plus loin possible en Coupe de la Confédération et rester dans le peloton en championnat national". Pour y parvenir, le technicien a exigé de son employeur "une prime de signature, un salaire mensuel, le logement et diverses autres primes (entraînement, matches gagnés,
|
matches internationaux). J’exige pour les relations publiques une prime pour le téléphone qui se situe entre 20 et 30.000 F Cfa par mois, plus le carburant pour mes déplacements". Tout cela doit figurer dans le contrat, même si cela n’est pas toujours respecté, précise-t-il. Ces exigences diffèrent selon la situation du demandeur et des objectifs fixés par ses dirigeants.
Dans son contrat, Alain Defrasne Djeumfa d’Aigle de Dschang a limité ses besoins "à une prime de signature, une prime de matches gagnés, une prime d’entraînement et un salaire mensuel". Salaire dont il n’a pas souhaité dévoiler le montant. Toutefois, il affirme que cela lui permet "d’assurer le maintien de l’équipe en première division". Ce luxe-là, Waïfé Féfé de Espérance de Guider ne peut y prétendre, compte tenu du fait qu’il "détient un semblant de contrat qui ne le satisfait pas. Rien n’a été signé depuis que j’ai commencé".
Néanmoins, malgré les tensions permanentes de trésorerie que connaît ce club, les dirigeants lui assurent tout de même un logement, et quelquefois, des crédits de communication. Sans plus. Le technicien n’a de salaire que celui de la Fonction publique. Salaire qu’il est très souvent obligé de dépenser, d’après lui, pour les besoins du club. "Toutefois, entre la démission et le soutien, je préfère aller jusqu’au bout. Car la démission n’est pas salutaire".
Du contrat de l’entraîneur, dépendent ses conditions de travail. Celles-ci, sont fonction selon, Dieudonné Nké, des objectifs arrêtés par les dirigeants du club employeur. Le technicien affirme qu’à son arrivé dans Canon, il a par exemple exigé le minimum, aussi bien en ce qui concerne le matériel didactique d’entraînement que le traitement des joueurs à qui le club devrait payer régulièrement les primes d’entraînement et les primes de matches. "Lorsque vous avez des joueurs qui sont bien dans leur tête, ils travaillent bien et les résultats suivent. Seulement, on n`a pas toujours [cet argent] sur la main".
Conditions de travail
En effet, les difficultés financières que connaissent de nombreux clubs ont des répercussions à moyen terme sur les résultats sportifs. Des deux objectifs majeurs que les membres du comité provisoire de Bamboutos de Mbouda ont fixés à Etienne Sockeng, le premier n’a pu être atteint. Les Mangwas Boys ont été piteusement sortis de la Coupe de la confédération après un sanglant 0-3 face à Fello Star de Labé (Guinée), à Douala, alors qu’en déplacement à Conakry, ils avaient concédé une courte défaite (1-0). M. Sockeng affirme que "ce n’est pas [sa faute]. J’ai fait mon travail. Eux, ils n’ont pas fais le leur. Les joueurs n’avaient pas reçu leurs primes. Ce qu’ils ont d’ailleurs revendiqué". Pourtant, si l’on s’en tient à ses déclarations, au moment de la signature du contrat, il dit avoir demandé "qu’on mette les joueurs à l’aise. Si je suis à l’aise tandis que les joueurs ne le sont pas, cela ne peut pas marcher". Mis à part cela, le club continue de fournir le matériel de travail de base : les ballons (en moyenne 20 par entraînement, les chasubles et les plots). Au Cameroun, c’est le moins qu’on puisse avoir, soutient Alain Djeumfa de Aigles de Dschang : "Compte tenu de l’environnement socio-économique, on ne peut être satisfait des conditions de travail".
La précarité des entraîneurs est à l’origine du projet de statut élaboré par l’Association camerounaise des entraîneurs de football (Acef). Ce document définit les qualités et missions d’un entraîneur. Il met également l’accent sur la "licence d’entraîneur", délivrée par la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) sur présentation d’un "contrat valable avec un club". D’ailleurs, le modèle de contrat proposé en annexe mentionne clairement les obligations de l’entraîneur vis-à-vis du club, et vice-versa. En attendant l’adoption de ce texte devrait ramener de l’ordre dans cette profession, les bruits de chaises, eux, sont toujours perceptibles au sein des staffs techniques des clubs de D1.
|
|
|
|
|
|
Hits: 4361 | quotidienmutations.info
| | | Toutes les ( 0 ) Réactions
|
|
|
Pour réagir, vous devez être connecté. Enregistrez vous et connectez vous.
|
Première page
Toute l' actualité
|
|
|
|
|
| |
|