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Union ou Tonnerre : Un monument va tomber (10.11.2005)
Un des géants du football camerounais devrait quitter la première division au terme de l’actuel championnat. Et c’est un drame.
Union – Tonnerre. L’affiche avait encore fière allure il y a deux décennies. A côté des légendaires Canon – Union, Canon – Tonnerre, Canon – Racing ou Union – Racing, la rencontre entre l’Union de Douala et le Tonnerre de Yaoundé était un des sommets du championnat camerounais de football de première division alléchant pour le public camerounais, et qui savait en outre envoyer sur la scène africaine de solides équipes conquérantes et redoutées. Aujourd’hui que ce championnat est orphelin du football et gagné par la violence, la corruption et les magouilles en tous genres, il n’y a pratiquement aucune chance que le jeu subsiste à l’enjeu du match qui va opposer les deux équipes au Stade de la Réunification de Douala, lors de la 34e et ultime journée du 46e championnat national de première division.
L’enjeu est en effet de taille. Certains le présentent même comme “la guerre” (sic) pour le maintien en première division. A l’issue de ce match, l’une de ces deux équipes devrait être reléguée en deuxième division. Dans le meilleur des cas, au moins l’une d’elles disputera le prochain tournoi Inter-poules pour espérer se maintenir en première division. La gravité de cette rencontre Union – Tonnerre est telle qu’elle a fini par perdre les dirigeants de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) dans leurs combines habituelles. Ils ont eu du mal à faire jouer cette explosive 34e journée qui doit clôturer le championnat. Initialement programmée pour le 30 octobre, elle ne devrait finalement se jouer que ce dimanche 13 novembre.
La relégation
ou les Inter-poules
Le 46e championnat national qui s’achève ainsi, se dispute avec 18 clubs. La Fécafoot ayant décidé que le prochain championnat se disputera avec 16 clubs, les quatre dernières équipes du classement (15e, 16e, 17e, et 18e) seront reléguées en deuxième division à l’issue de la 34e journée. Deux autres équipes (13e et 14e) vont disputer les Inter-poules en compagnie des dix champions provinciaux, pour désigner les quatre équipes qui viendront compléter le prochain championnat à 16 clubs. Pour l’heure, Université de Ngaoundéré (17e avec 33 points) et Unisport de Bafang (18e avec 26 points), sont sûrs d’évoluer la saison prochaine en deuxième division. Et le maintien, y compris en passant par les Inter-poules va se jouer entre six clubs : Ksa de Douala (11e avec 43 points), Racing de Bafoussam (12e avec 41 points), Union de Douala (13e avec 38 points), Mount Cameroon de Buea (14e avec 38 points), Tonnerre de Yaoundé (15e avec 37 points) et Pwd de Bamenda (16e avec 37 points).
La rencontre Union – Tonnerre oppose donc deux équipes menacées de relégation, l’une devant forcément éliminer l’autre : 1) Si l’Union l’emporte sur ses installations du stade de la Réunification, Tonnerre descendra automatiquement en deuxième division et Union jouera son maintien lors des Inter-poules, sauf si Racing ne vient pas à bout de Bamboutos à Bafoussam, et Ksa ne ramène pas au moins un point de son déplacement périlleux de Dschang contre l’Aigle de la Menoua qui jouera pour décrocher sa qualification à la Ligue des champions africaine. 2) En cas de match nul, Union jouera les Inter-poules et Tonnerre descendra en deuxième division et ne pourra espérer les Inter-poules que si Mount Cameroon perd son match de Ngaoundéré contre l’Université locale par au moins 7 buts d’écart. 3) Si Tonnerre parvient à vaincre Union à Douala, les deux équipes disputeront les Inter-poules au cas où Mount Cameroon ne gagne pas à Ngaoundéré. 4) Si Tonnerre l’emporte par au moins 4 buts d’écart et dans le même temps, Mount Cameroon s’impose à Ngaoundéré, Tonnerre dispute les Inter-poules et Union est reléguée en deuxième division.
Services rendus
Alors, Union ou Tonnerre ? Il n’y a peut-être pas de choix à faire. Autrement, on choisirait bien le maintien de ces deux équipes en première division, ne serait-ce que pour l’histoire du football camerounais. Mais, qu’il s’agisse de l’Union ou de Tonnerre, le championnat camerounais pourrait bien être privé ce dimanche d’un autre de ses monuments, après avoir déjà perdu l’Oryx de Douala, le tout premier vainqueur d’une compétition africaine de clubs. Ce sera un vrai drame, tant il est vrai que le Tonnerre de Yaoundé et l’Union de Douala représentent avec le Canon de Yaoundé, les plus beaux palmarès du football camerounais, et de très belles pages de son histoire.
Vainqueur en 1975 de la toute première coupe d’Afrique des clubs
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vainqueurs de coupes, le Tonnerre de Yaoundé est aussi détenteur de cinq titres de champions du Cameroun et a remporté la coupe du Cameroun à quatre reprises. Le Tkc c’est surtout le club de Roger Milla, mais aussi l’équipe qui a révélé George Weah au monde, soit les deux meilleurs footballeurs africains de tous les temps. Tonnerre c’est également le kalara, ce beau football que savaient incarner les Mama Jean – Louis, Belinga, Dibongué, Djonkep Bonaventure, Koffi Abrey, Japhet Ndoram, voire Ernest Ebongué.
L’Union de Douala sacrée champion du Cameroun à quatre reprises et détenteur de cinq coupes du Cameroun est le dernier club camerounais à avoir remporté une coupe africaine des clubs, c’était en 1981, en coupe d’Afrique des clubs vainqueurs de coupes, deux ans après avoir remporté en 1979, la ligue africaine des champions. L’Union de Douala c’est aussi le club de Joseph-Antoine Bell, le club au million de supporters et au football rigoureux qu’ont su incarner les François Ndoumbé Léa, Kamga, Ekoulé, Enanga Zozo, Emile Mbouh, André Kana Biyick, David Mayebi, Edmond Enoka, Roger Feutmba et autres.
Alors, se priver du Tonnerre de Yaoundé ou de l’Union de Douala, serait un peu, toutes proportions gardées comme si la Liga espagnole se passait du Fc Barcelone ou de l’Athletico Madrid ; comme si le Calcio italien était privé de la Juventus de Turin ou de l’Inter de Milan. Ce n’est d’ailleurs là que l’amorce d’un mouvement qui pourrait bientôt faire d’autres victimes parmi les ex-grands clubs camerounais. Celui des deux l’Union ou du Tonnerre qui échappera à la relégation ce week-end, pourrait encore avoir à se battre aux Inter-poules pour se maintenir en première division. Qui sait d’ailleurs combien d’années encore des équipes comme le Canon de Yaoundé, ex-grand d’Afrique et Racing de Bafoussam, ancien Tout puissant de l’Ouest, aujourd’hui empêtrés dans d’inextricables problèmes de gestion, parviendront à se maintenir en première division ?
Cahiers de charges
A qui la faute si le championnat camerounais de football perd des clubs qui ont jadis constitué son élite ? Sans doute, les responsables de ce recul sont d’abord les dirigeants de ces clubs de tradition qui se complaisent dans un amateurisme étonnant, où l’on voit une équipe comme le Canon de Yaoundé, sans siège 40 ans après et végéter à l’antique stade malien pour ses séances d’entraînement. La faute aussi à ces équipes villageoises et unipersonnelles qui germent ici et là, créées par de nouveaux riches avides d’anoblissement par le football, en devenant maire, député, ministre, ou désireux de gagner un peu plus d’argent par la vente scandaleuse de jeunes talents locaux.
Ces nouveaux clubs sans véritable projet sportif, ont la particularité de porter le nom du village de leur fondateur, mais avec des présidents, des entraîneurs et des joueurs qui résident à Douala ou à Yaoundé. Certains parmi eux ont réussi à atteindre la scène africaine, mais n’y ont rien démontré parce qu’ils n’étaient pas faits pour y être. D’autres, ont fini par sombrer aussitôt que leur promoteur a atteint son objectif. Mais, dans l’ensemble, ces équipes villageoises ont privé les équipes de tradition que sont le Canon, l’Union, le Tonnerre, Racing, Panthère, Dynamo, Unisport, de moyens financiers, humains et de footballeurs talentueux qui, mieux utilisés auraient concouru au rayonnement du championnat camerounais.
Aujourd’hui, ce championnat ne compte plus que sur Cotonsport de Garoua pour faire illusion. Mais, l’équipe de la Sodecoton, tout comme Prévoyance, Fogape, Rail Fc ou Port Fc, est bâtie sur du sable mouvant et ne durera pas longtemps. Or, il n’y a pas de championnat digne de ce nom, sans clubs solides et viables pour l’animer. Et, ce n’est pas en modifiant au gré des années la formule de la compétition qu’on construit un tel championnat ; ce n’est pas non plus en favorisant l’existence en première et deuxième divisions, d’une trentaine de clubs sans véritables ressources dans une ville comme Douala que l’on bâtit un tel championnat. On ne peut le faire qu’en imposant un véritable cahier de charges aux clubs ; cahier de charges dont le respect est soumis au contrôle d’un organe neutre et compétent.
Davantage, il n’y a pas de championnat conquérant sans un socle, un noyau dur de clubs qui en portent la tradition et en perpétuent l’esprit d’année en années, au gré des crises et en s’adaptant aux nouvelles exigences du football. Tonnerre de Yaoundé et Union de Douala, tout comme le Canon de Yaoundé et Racing de Bafoussam font partie de ce socle là.
Par Ambroise EBONDA
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